Olivier Maurel

Écrivain militant – Non à la violence éducative !

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Graines de non-violence – Shirley Carol Strum (4)

Graines de non-violence

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Shirley Carol Strum (4)

Le livre de Shirley Carol Strum : Voyage chez les babouins, nous fait voir les babouins comme une société où l’agressivité est mesurée, où existent aussi des processus de réconciliation, notamment à travers le toilettage, et où les relations entre individus sont très loin de ne se régler que par des rapports de force.
Cette vision de la société de nos cousins primates s’oppose à l’idée si fréquemment exprimée que nous autres primates serions des bêtes féroces dont les instincts déchaînés produiraient les violences et les guerres auxquelles nous assistons tous les soirs à la télévision.
Il est très probable que ces guerres ne prennent pas leur source dans l’animal que nous portons en nous. Notre cerveau animal sait, si l’on peut dire, qu’en tant qu’animaux sociaux, nous ne pouvons pas survivre sans les autres, qu’établir des liens avec les autres est vital pour notre propre conservation. Aucun instinct ne nous pousse à détruire les autres.
Malheureusement la croyance à la méchanceté de notre nature animale nous a amenés, depuis des millénaires, à vouloir la corriger dès le plus jeune âge. Ce faisant, on a altéré la nature sociale des enfants, on a réduit leur capacité d’empathie et d’attachement. On leur a donné l’exemple de la violence. On leur a appris à obéir aux règles du groupe social auquel ils appartenaient, mais cela au détriment du respect dû à toute personne humaine. On leur a souvent désigné comme ennemies les personnes étrangères à leur groupe, déchaînant ainsi d’interminables enchaînements de violences.
Et si, pour changer un peu, nous nous remettions à l’école des babouins de Shirley Carol Strum ?

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Graines de non-violence – Shirley Carol Strum (3)

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Shirley Carol Strum (3)

Je parlais dans ma dernière chronique de la primatologue Shirley Carol Strum qui, dans son livre Voyage chez les babouins, montre que chez les babouins, l’agressivité est relativement rare, qu’elle est modérée par la maîtrise de soi acquise dans les jeux et qu’elle est plutôt le fait des nouveau venus dans la troupe qui doivent tester leurs nouveaux compagnons.
Shirley Strum combat un autre préjugé, celui de la domination exclusive des mâles sur les femelles. D’après elle, ”les mâles sont loin d’être la force vive des groupes. Ils sont supérieurs à toutes les femelles et à tous les jeunes par la taille et la force, mais leur sphère d’influence est beaucoup plus limitée qu’on ne croit (…) Dans certaines situations, les mâles s‘en remettent aux femelles, dans d’autres, ils prennent le commandement.
D’après elle, “le vrai pouvoir appartient à ceux qui, par leur sociabilité se sont fait de nombreux alliés plutôt qu’à ceux qui ont recours à la force brute”. Quant aux femelles agressées, elles n’ont qu’à crier assez fort et des renforts arrivent pour les soutenir” “Le système familial est solidaire et efficace”.
Shirley Strum a même observé que quand se produit un combat entre mâles pour la possession des femelles, c’est le vaincu, apparemment, qu’elles traitent le mieux. Il jouit des attentions des femelles réceptives, on lui cède les aliments les plus appréciés, on le toilette souvent.”
Shirley Strum conclut de cette observation de nos cousins primates que “rien ne prouve que l’agression, la supériorité des mâles et leur mainmise sur le pouvoir politique soient caractéristiques du mode de vie des premiers humains.”

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Graines de non-violence – Shirley Carol Strum (2)

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Shirley Carol Strum (2)

Je parlais dans ma dernière chronique de l’anthropologue et primatologue Shirley Carol Strum qui, dans son livre Voyage chez les babouins, montre que chez les babouins, c’est bien davantage l’amitié qui règne que l’agressivité entre individus et entre bandes différentes, contrairement aux idées admises sur la violence des sociétés de primates.
Elle va même jusqu’à dire que les babouins sont “gentils” entre eux, non pas par vertu, mais parce que c’est tout simplement vital pour maintenir le lien social.
Les jeunes babouins apprennent au cours de leurs jeux la maîtrise de soi dans l’agression. Si bien qu’il est assez fréquent de voir un jeune babouin de 15 kilos foncer comme un bolide sur un babouin enfant, s’arrêter net avant de l’avoir écrasé de sa masse et se contorsionner pour s’abaisser à son niveau.
L’agressivité, quand elle se produit, est surtout le fait des nouveau venus dans la troupe. Et elle serait un moyen d’amorcer une négociation, un moyen aussi d’apprendre ce qu’ils ont besoin de savoir au sujet des autres mâles. L’agressivité diminue d’ailleurs au fur et à mesure que les babouins acquièrent de l’ancienneté dans la troupe.
Shirley Strum dit avoir été frappée par le même faible niveau d’agressivité quand elle a étudié les gorilles des montagnes. Les mêmes observations ont été faites sur les loups, sur les chiens de prairie et d’autres espèces de singes.
Cela ne signifie pas que les babouins soient des anges. Ils sont par exemple sans pitié envers des congénères blessés, probablement, dit Shirley Strum, parce que la blessure ou la mutilation fausse l’apparence du sujet blessé et que la communication avec lui en est elle aussi faussée.

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Graines de non-violence – Shirley Carol Strum (1)

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Shirley Carol Strum (1)

Connaissez-vous Shirley Carol Strum ? C’est une biologiste et anthropologue qui a étudié pendant vingt-cinq ans les primates, et spécialement les babouins. Le résultat de ses études a été publié en français au Seuil en 1995, dans un livre passionnant intitulé Voyage chez les babouins. Ce livre m’a tellement intéressé que je voudrais lui consacrer deux ou trois chroniques.
À l’époque où elle a commencé ses recherches, la pensée dominante était celle de l’écrivain et paléoanthropologue Robert Ardrey qui voyait l’homme comme un primate tueur et l’histoire de la civilisation comme une histoire de l’art de tuer. Au passage, c’est lui qui a inspiré le scénario de l’Odyssée de l’espace, de Stanley Kubrick.
Or, ce qu’a constaté Shirley Carol Strum en observant les babouins qui ont en commun avec nous d’être des singes adaptés à la savane, ne correspondait pas du tout à cette vision sinistre des primates.
En effet, ce qu’elle a vu c’est que, dans la société des babouins, “ce n’est pas l’agression mais l’amitié qui permet d’obtenir ce que l’on désire”.
L’instinct social est inné chez ces primates. Chacun d’eux tire un grand plaisir de la compagnie des autres. Et cette sociabilité est aussi cultivée, notamment par la toilette mutuelle qui a, en plus l’avantage majeur de faire des babouins l’espèce animale qui a le moins de parasites.
D’ailleurs, même lorsqu’un mâle agressif cherche à s’emparer d’une femelle, l’agressivité obtient de moins bons résultats que des moyens détournés.
Même entre les bandes de babouins, les rapports sont relativement paisibles et n’aboutissent qu’assez rarement à des affrontements. La suite au prochain numéro.

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Graines de non-violence – Une violence modérée ?

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Une violence modérée ?

Les articles sur les punitions corporelles infligées aux enfants, ce que j’appelle la violence éducative ordinaire, sont très souvent construits sur le même schéma.
On commence par évoquer, selon l’actualité qui suscite l’article, soit le point de vue des partisans de la fessée, soit celui de ses adversaires. Puis, on fait appel à des spécialistes dont le point de vue est intermédiaire. Ceux ou celles qui disent, par exemple, qu’il ne faut pas banaliser la fessée, mais qu’il ne faut pas non plus la diaboliser; ou bien qu’il ne faut l’employer que rarement, mais qu’il faut la garder en réserve.
Mais dans une société où la fessée est précisément banalisée et où 80% des parents l’utilisent, selon les dernières études, cela revient à cautionner son emploi et à faire apparaître les adversaires des punitions corporelles comme des ayatollahs intransigeants, alors que la sagesse serait dans la modération, c’est-à-dire dans l’acceptation d’un peu de violence, mais pas trop.
Que penserait-on d’un article sur la violence conjugale où, après avoir rapporté le point de vue d’un conjoint violent et celui d’une femme battue, on ferait appel à des spécialistes “sages”, “modérés”, dont le point de vue consisterait à dire qu’il ne faut pas trop frapper les femmes, jamais en tout cas avec un bâton ou une ceinture, mais qu’une claque de temps en temps peut être utile à l’harmonie conjugale.
C’est pourtant là que nous en sommes en ce qui concerne la violence avec les enfants. Mais nous ne nous en apercevons pas, parce que cette violence “modérée”, nous avons appris à l’accepter depuis notre petite enfance.

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Graines de non-violence – Mickey, Mickaël et Manuela

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Mickey, Mickaël et Manuela

Qu’y a-t-il de commun entre l’acteur américain Mickey Rourke et Manuela et Mickaël, meurtriers d’une épicière dans le Loiret ?
Mickey Rourke, pourtant capable d’interprétations remarquables au cinéma, a eu toute sa vie un comportement suicidaire et souvent violent. Il a d’abord été boxeur avant de devenir acteur. Puis, quand ses succès ont décliné, il est remonté sur le ring  pendant quatre ans, jusqu’à en être complètement défiguré : langue déchirée, nez cassé, pommettes écrasées. Il a reconnu que sa carrière de boxeur était une entreprise d’autodestruction. Remonté sur les plateaux de cinéma, il a ensuite réussi à reconquérir une certaine notoriété. Mais son soutien actif et à George Bush et à l’IRA irlandaise n’en fait pas un modèle de non-violence.
Manuela et Mickaël, de leur côté, sont deux jeunes meurtriers d’une épicière dans le Loiret, condamnés à vingt ans de prison en mars dernier. Mickaël s’est appliqué toute sa vie à “se foutre en l’air”, selon ses propres termes, à coups de drogues diverses, surtout après la mort de son père qui l’a profondément bouleversé. Manuela, elle, dit n’avoir aucun souvenir entre zéro et 17 ans.
Qu’ont-ils donc en commun avec Mickey Rourke ? Mickey Rourke était tabassés tous les jours par son beau-père. Et quand ce n’était pas lui, c’étaient les gamins du coin qui le transformaient en punching-ball. Mickaël de son côté a été chassé de chez sa mère à l’âge de 15 ans par son beau-père violent et alcoolique. Et quant à Manuela, son amnésie avait des raisons : sa soeur aînée a témoigné des coups de balai que lui assénait souvent leur mère.

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Graines de non-violence – Les femmes, les hommes et la violence

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Les femmes, les hommes et la violence

Le 17 mai dernier, la romancière Nancy Huston a publié dans Le Monde un article où elle posait des questions bien intéressantes.
Pourquoi, demandait-elle, les hommes constituent-ils, de par le monde, entre 90% et 100% des criminels, des pédophiles, des violeurs ?
J’aimerais bien savoir, ajoute-t-elle, pourquoi la spécificité des hommes (c’est-à-dire des mâles de l’espèce humaine) semble être le massacre des innocents. Ce n’est pas l’espèce humaine qui fait ça, mais les mâles de l’espèce.
Qu’est-ce qui empêche les femmes de former des milices armées, de fomenter des complots internationaux, d’organiser des attentats ? Pourquoi si peu de fillettes raffolent-elles de jeux vidéo violents ? Pourquoi les adolescentes n’entrent-elles jamais dans une salle de classe ou un restaurant fast-food pour ouvrir le feu sur leurs semblables ?
Nancy Huston n’ignore pas que les femmes sont capables de tuer, et même de débiter quelqu’un en morceaux, mais toujours quelqu’un qu’elles connaissent, dans le cadre d’un meurtre passionnel. Jamais des inconnus.
Nancy Huston refuse l’explication féministe selon laquelle quand les femmes seront à égalité avec les hommes, elles seront tout à fait capables de commettre les mêmes horreurs. Elle ne pense pas non plus que cela vienne du simple instinct maternel, mais plutôt de la pratique de la maternité qui ferait acquérir aux femmes, culturellement, une précieuse connaissance de l’humain, une sagesse utile, susceptible d’être transmise aux hommes. Autrement dit, le but ne serait pas que les femmes imitent les hommes, mais plutôt le contraire. Il y a là matière à réflexion.

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Graines de non-violence – Nouvelles formes d’actions

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Nouvelles formes d’actions

Le magazine La Vie présentait, en mai dernier, les nouvelles formes d’action qui commencent à se répandre et qui peuvent nous donner des idées si nous avons nous-mêmes à défendre une cause quelconque.
Il évoquait par exemple les groupes ludiques qui organisent de pseudo manifestations pour la défense des riches ou contre la protection de l’environnement aux cris de “Non à l’écologie, Oui aux 4X4”.
Ou encore la BAC, Brigade activiste des clowns qui, en 2005, avait entrepris de nettoyer la mairie de Neuilly au Kärcher après les déclarations sur cet instrument de son ancien occupant.
Les lectures publiques, par exemple celle de La Princesse de Clèves, après ce qu’avait dit de ce roman le même occupant.
Les rondes des obstinés qui ont été menées pendant des mois dans plusieurs villes par les universitaires opposants à la loi Pécresse.
Un collectif d’associations chrétiennes de soutien aux migrants, sur le thème “Devenir grain de sable”, rappelle que toute une chaîne de corps de métier participe aux expulsions et que chacun, là où il est, peut à sa manière devenir le “grain de sable” qui va les rendre difficile, voire les empêcher.
Le magazine citait aussi les enseignants désobéisseurs, dont j’ai déjà parlé ici et dont l’action se poursuit.
L’association Robin des bois qui vient rétablir l’électricité chez les familles en difficulté.
Ou encore, les cercles de silence organisés pour protester contre les conditions dans lesquelles sont traités les sans-papiers, cercles de silence dont un, je suppose, continuera à se tenir à Toulon, sur la Place de la Liberté, le 30 de chaque mois, au moment où cette chronique sera diffusée.

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Graines de non-violence – La contagion du rire

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La contagion du rire

Vous avez peut-être vu, sur Internet, ce petit film réjouissant où l’on assiste, dans un métro, à une formidable contagion de fou rire. La scène se passe dans un métro à une heure de relative affluence. Chaque passager est enfermé en lui-même, le visage morne, impassible. Personne ne parle à personne. Soudain, un passager, qui est en fait un comédien, commence à sourire, feint de ne plus pouvoir retenir son rire, et, malgré tous ses efforts apparents, se met à rire tout haut. Quelques passagers se tournent vers lui, surpris, apparemment choqués d’une telle indiscrétion. Il feint de se retenir, puis pouffe de nouveau, de plus en plus fort et de façon de plus en plus irrésistible. On voit alors ses voisins se retenir de plus en plus difficilement de rire eux aussi. Quelques-uns n’y tiennent plus et éclatent de rire. Et c’est bientôt tout le wagon qui éclate d’un rire irrésistible et interminable. Mais on arrive à une station. Chacun essaie de se retenir pendant que de nouveaux passagers montent. Et au bout de quelques secondes, les rires de nouveau fusent sans que le comédien lui-même ait eu à les déclencher. Inutile de dire que l’internaute, moi en l’occurrence, rit lui aussi aux larmes derrière son écran.
Il est certes réjouissant de voir combien le rire est communicatif. Mais il est intéressant aussi, et un peu inquiétant, de voir à quel point notre fonctionnement est mimétique. Au point que nous pouvons nous mettre à rire sans aucune autre raison que l’imitation du rire des autres ou d’un autre. Il est bon de s’en souvenir car la violence peut être aussi mimétique que le rire.

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Graines de non-violence – Des rats, du stress et des enfants

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Des rats, du stress et des enfants

J’ai parlé plusieurs fois dans ces chroniques de effets nocifs de la violence éducative sur la santé, notamment par le biais des hormones du stress qui, lorsqu’elles ne peuvent provoquer le comportement qu’elles ont pour but de susciter, c’est-à-dire la fuite ou la défense, deviennent toxiques et portent notamment atteinte au système immunitaire.
Une expérience récente effectuée par des chercheurs américains vient encore de le confirmer.
Ces chercheurs ont soumis des rats à des brûlures, mais à des brûlures sous anesthésie, qui n’ont pas occasionné de stress à ces animaux. Ils ont ensuite placé ces rats dans trois environnements différents. Un premier groupe a été placé dans une cage avec des congénères et avec des matériaux pour se construire un nid. Les individus d’un second groupe étaient isolés dans des cages où ils pouvaient se construire un nid. Enfin, les individus d’un troisième groupe étaient également isolés dans des cages, mais sans possibilité de se construire un nid.
Quatre semaines plus tard, 92% des rats du premier groupe qui disposaient d’un nid et de la compagnie de congénères étaient guéris, contre 64% dans le second groupe et 12% seulement dans le troisième groupe des isolés sans nid.
D’après ces chercheurs, c’est l’expression des gènes impliqués dans la gestion du stress qui avait été modifiée par les conditions dans lesquelles s’étaient retrouvés les rats.
Cette expérience montre bien que les capacités de récupération d’un organisme animal sont fortement affaiblies par les effets du stress. Provoquer le stress chez un enfant, même dans une bonne intention, c’est aussi porter atteinte à sa santé.