Olivier Maurel

Écrivain militant – Non à la violence éducative !

By Olivier Maurel

Au Pape François

Au cours de son audience générale du 4 février, le Pape François qui, jusqu’à présent, avait fait un parcours bien intéressant, a parlé du rôle du père dans la famille. Il a parlé de la nécessité de sa présence active, de son exemplarité, de sa capacité à pardonner. Jusqu’ici, rien à redire. Mais les choses se gâtent quand il se met à parler de la nécessité pour le père de corriger avec fermeté. Le père, pour lui « n’est pas un père faible, accommodant, sentimental. Le père qui sait corriger sans humilier est aussi celui qui sait protéger sans se ménager. Un jour, lors d’une réunion de mariage, j’ai entendu un père dire : « Parfois, je dois donner une petite claque à mes enfants… Mais jamais sur la figure pour ne pas les humilier ». Comme c’est beau ! Il a le sens de la dignité. Il doit punir, il le fait de façon juste et il va de l’avant. »

Cher Pape, on voudrait croire que vous avez été ici seulement plus spontané que réfléchi, et que vous avez eu tendance à ne voir que le positif dans l’attitude de ce père : il est ferme, il ne veut pas humilier ses enfants, il ne les frappe pas sur la figure, il ne leur donne qu’une « petite » claque . Malheureusement, ce que vous avez dit ne fait que refléter la doctrine de l’Église en matière d’éducation. Vous n’avez fait que reprendre, dans votre style familier, ce que dit l’article 2223 du Catéchisme de l’Église catholique qui est rédigé ainsi : « C’est une grave responsabilité pour les parents de donner de bons exemples à leurs enfants. En sachant reconnaître devant eux leurs propres défauts, ils seront mieux à même de les guider et de les corriger « Qui aime son fils lui prodigue les verges, qui corrige son fils en tirera profit ».

Et c’est même pour cette raison que le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies, en janvier 2014, au cours de sa 65e session, a épinglé l’État du Vatican dont vous êtes le chef, non seulement pour n’avoir pas encore interdit les punitions corporelles comme il le demande à tous les États de le faire, mais pour avoir recommandé explicitement de frapper les enfants. Et vous avez sous votre responsabilité non seulement les 39 enfants du personnel du Vatican qui y vivent, mais aussi les 57 600 000 enfants qui vivent dans les établissements dépendant de l’Église.

Faut-il vous rappeler qu’un certain Jésus a vivement réprimandé ses disciples pour avoir seulement rabroué les enfants qui venaient auprès de lui ? Faut-il vous rappeler que le père du fils prodigue que vous avez cité dans la même audience, non seulement ne châtie pas son mauvais larron de fils autrement coupable que la majorité des enfants que vous recommandez de frapper, mais court au devant de lui, se jette dans ses bras et ne fait même pas attention au pardon que lui demande son fils, tout occupé qu’il est, dans sa joie, à commander qu’on tue le veau gras ?

Dépêchez-vous, cher Pape François, de relire les extraordinaires paroles de Jésus sur les enfants qui nous les présentent comme des modèles (« Le Royaume des Cieux est à ceux qui leur ressemblent ») et écrivez bien vite une encyclique où, comme vos prédécesseurs ont demandé pardon pour les guerres de religion, pour le chasse aux sorcières, pour la condamnation de Galilée, pour les croisades, pour les abominables crimes pédophiles commis par des prêtres, vous demanderez pardon pour l’Église d’avoir pendant vingt siècles recommandé de frapper les enfants. Dans ce cas-là, nous pourrons recommencer à parler du bon Pape François.

Olivier Maurel